La phrase, prononcée hier après-midi, à Marseille, par une Gilet jaune, a fait mouche, ou plutôt a fait le buzz.

Au début de la manifestation, un groupe de Gilets jaunes se dirige vers une équipe de journalistes de France 3 et lui demande sur un ton énergique de quitter les lieux, de s’éloigner des manifestants, en un mot de : déguerpir ! Une Gilet jaune, particulièrement remontée, assène aux photoreporters présents : “Les journalistes ne font que mentir, la seule info c’est sur les réseaux sociaux”.

Mais diantre, comment en est-on arrivé là ? A qui donc la faute ? Désormais, mais ça ne date pas d’aujourd’hui, les journalistes, les médias plus généralement, sont “vomis” autant que les hommes politiques et les juges.

Hier, pour l’acte IX du mouvement des Gilets jaunes, partout en France où se déroulait une manifestation, des journalistes ont été pris à parti, insultés, menacés, voire dans certains cas bousculés et frappés ! Des journalistes qui sont pratiquement obligés désormais d’être encadrés par des armoires à glace pour aller faire leur métier sur le terrain. Du jamais vu, en France en tout cas, même lors des événements de mai 1968 ou de 1995. Dans une démocratie, cela est inadmissible, insupportable, tout le monde sera d’accord avec ce propos.

Les journalistes, via notamment leurs syndicats professionnels, ou quelques présentateurs de télévision et chroniqueurs qui osent hausser le ton, condamnent avec la plus grande fermeté ces actes. Jusqu’au sommet de l’Etat, l’Elysée et Matignon, qui par la sphère twitter interposée, promettent des sanctions d’une sévérité exemplaire contre leurs auteurs. “Dans notre démocratie, la presse est libre”, a réagi hier à la mi-journée le ministre de l’Intérieur, Christophe CASTANER.

Ok, mais “libre de quoi ?”. Car si les réseaux sociaux regorgent de fake news (fausses nouvelles) – il serait grand temps d’ailleurs que l’Exécutif pondent une loi pour se pencher sur le sujet et débusquer tous les pseudos qui derrière leur masque appellent à la haine, à l’insurrection… – force est de constater que les journaux télévisés et autres rendez-vous d’information sont souvent à charge dans leurs reportages.

Comment peut-on tolérer, par exemple, sur une chaîne du service public, qu’un animateur se vante que dans son émission il n’invitera jamais, ô grand jamais, Marine Le PEN ? Douze millions de Françaises et de Français ont pourtant voté pour elle lors de la dernière élection présidentielle… Que dire encore des chaines d’infos en continue qui, pour être soi-disant au cÅ“ur de l’actualité, nous déversent en permanence des scènes de violence, résumant ainsi le mouvement des Gilets jaunes à une horde de casseurs, à des bandes de voyous incendiaires (et maintenant violeurs et racistes) ?

Hier encore, aux premières heures de la matinée, certains canaux sont allés jusqu’à créer la confusion (on espère encore que c’est involontaire de la part de leurs commentateurs) entre le mouvement des Gilets jaunes et l’explosion d’une boulangerie dans le IXème arrondissement de Paris, qui a causé entre autres la mort de trois personnes (deux pompiers et une touriste espagnole originaire de la région de Tolède)… On assiste à une surenchère dangereuse de l’Info qui fait trop souvent, hélas, dire et écrire n’importe quoi aux médias spécialisés mais également aux médias généralistes.

Il y a bien pire encore : cette sale manie prise par certains journalistes en vogue à l’antenne de sortir les phrases de leur contexte, pour bâtir dessus un scénario, un scoop ! Assistez à une conférence de presse, et vous verrez ensuite ce qu’il en ressort au micro ou sous la plume d’un journaliste… Etonnant, déroutant pour le moins, quand cela n’en devient pas inquiétant et mensonger.

On pourrait hélas multiplier les exemples à l’infini s’agissant du manquement de certains journalistes dans le droit et le devoir d’informer. Que font les écoles de journalisme, les syndicats professionnels de la profession, face à toutes ces dérives ? Où est passée la sacro-sainte Déontologie ?

Les Gilets jaunes n’ont bien sûr pas raison d’agresser la Presse, mais leur mouvement exprime des doutes et des rancoeurs vis-à-vis des médias qui se sont accumulés depuis les années des présidences Sarkozy et Hollande.

Il ne reste plus qu’à souhaiter que la profession “Journaliste” se remette véritablement en question, plutôt que de pleurnicher sur le sort que lui réservent les Gilets jaunes samedi après samedi. Car il y a urgence.