Je ne sais pas vous, mais nous avons rencontré beaucoup de personnes, d’amis, de connaissances, qui cette année ont expliqué pourquoi elles avaient certaines réticences à prononcer ces deux petits mots bien sympas toutefois : bonne année !

 

Pourquoi ce scepticisme ? Pourquoi cette appréhension ? Pourquoi cette méfiance envers l’année qui commence ? Pourquoi, en quelque sorte cette peur ? Peur d’affronter la réalité à laquelle nous sommes déjà confrontés ?

Quelle est la réalité ?

Les jours passent, les semaines, les mois, bientôt les années et toujours le même terrain. D’abord celui de la pandémie. Nous ne nous attarderons pas. Le sujet sans cesse controversé sous toutes ses formes, ses caricatures, fait à chaque réveil la “une” de la presse quotidienne. Les “pour” une proposition, lève immédiatement les “contre”. Ces “pour” et ces “contres”, sont immédiatement traduis en pourcentages. Ces derniers viennent donner sujet à discussion à tout ce qui compte de journalistes savamment issus de la société de consommation. Ainsi, on vient nous entretenir d’une fièvre morbide qui finalement se relativise lorsque nous regardons autour de nous. Lorsque nous prenons un peu de recul sur les choses, sur la vie de tous les jours. Or, que nous indique cette dernière ?

Que se passe-t-il dans nos villages, dans la ruralité ?

Pour nous, dans la vallée de l’Agly, une chose semble faire l’unanimité dans les propos.
Le mal-être de la première économie : la vigne et le vin vont mal.
Il est certain qu’il est important de montrer les choses positives, de montrer ce qui suscite l’espoir. Mais attention aux illusions qui ainsi, peuvent être créées. Attention aux lendemains qui déchantent. Les aurores risquent d’être tumultueuses, orageuses, si la chape de plomb n’est pas levée pour donner toutes les vérités sur la situation. C’est bien ainsi que les choses sont ressenties. Pas uniquement par les vignerons, mais bien au-delà par tous ceux du monde rural ayant les mêmes intérêts finalement, et qui voient une situation leur échapper, filer entre leurs doigts.
De là, découlent les autres situations. Suppression de la perception sur Estagel. À quand le tour du bureau de poste ? À quand celui de l’agence du Crédit Agricole ? (la maison de santé, dans le village voisin, connaît de graves difficultés aussi.) Dans le centre du village, il ne reste plus qu’une seule épicerie, qui risque fort de fermer définitivement ses portes prochainement.
Pour acheter une boîte de sel, faudra-t-il que nos aînés en particulier, s’acheminent appuyés sur leur canne, à l’autre bout du village sans aucune sécurité, ou si peu, tout au long du trajet ?
Faudra-t-il qu’il en soit ainsi pour acheter le pain quotidien ?
Si cette situation devait devenir une réalité, perclus de rhumatismes, nous qui demain seront devenus les “vieux”, notre choix de vie deviendra restreint. Il se nommera maison de retraite. Et dans l’année qui suivra, le dernier voyage sous le triste ombrage des cyprès. Accepterons-nous cet avenir conçu par des irresponsables qui n’ont rien à faire de l’humain ?
Le plus terrible dans cette vision qui peut apparaître comme apocalyptique, est que personne ne s’insurge. Malgré les millions promis pour revitaliser les centres de nos villages, rien ne vient. L’espoir, s’envolera-t-il au grès du souffle de la tramontane qui semble en ce début d’année, vouloir renouer avec un passé venté que nous avons pourtant bien connu ?

À qui incombe le rôle de “battant” pour changer la réalité ?

Poser la question, est déjà y répondre. Il nous semble que ceux, qui voilà quelques mois sont venus solliciter nos suffrages, sont les mieux placés. Mais disons le tout net, rien ne semble les faire transpirer si ce n’est quelques aménagements environnementaux ou certains, en lieu et place de pousser des valises, préfèrent prendre le râteau ou les cisailles.
La valise risque de déborder d’idées, alors que les cisailles et le râteau ne ferons jamais qu’égaliser une situation que nous pouvons juger dramatique. La seconde situation, celle de la cisaille et du râteau, a un mérite. Elle ne demande pas la réflexion.
Alors, étant donné les tergiversations de nos édiles, une autre possibilité existe pour tirer la charrue. Ce sont les partis politiques. Mais où sont ces derniers ? Aucun sur le terrain pour apporter de l’espoir pour un autre monde. Aucun pour apporter un peu de rêve. Et ce ne sont pas les syndicats, aussi généreux soient-ils, qui vont pouvoir apporter une once de renouveau. Ce n’est pas leur responsabilité. Leur responsabilité est de veiller aux revendications salariales et en aucun cas de s’impliquer dans les affres de la politique. Or, lorsque nous parlons d’aménagement du territoire, c’est bien de choix politiques qui sont en question.
Et voilà, rapidement fait, en ce début d’année 2021, un tour d’horizon de la situation que nous sommes en train de vivre et qui nous fait dire : seule l’intervention directe des citoyens dans la vie, pourra changer la donne. Sans cette prise en compte, point de salut.
C’est notre sentiment !

Joseph Jourda