L’AGAUREPS-Prométhée (Association pour la Gauche Républicaine et Sociale – Prométhée) et la Revue « Progressistes – Sciences Travail & Environnement » organisaient jeudi 27 novembre à Prades une conférence/débat intitulée « Intensification du travail, souffrance au travail : l’exemple de l’industrie automobile ». Francis Daspe, secrétaire général de l’AGAUREPS-Prométhée, introduisait la soirée par une double remarque. « La recherche compulsive du profit entraîne une intensification du travail qui provoque bien souvent une souffrance accrue : c’est donc bien le fonctionnement même du système capitaliste et de ses valeurs dominantes que nous allons interroger aujourd’hui ». Et d’inviter à ne pas oublier que « ceux qui n’ont pas de travail souffrent, ceux qui en ont un souffrent aussi trop souvent ».

Pierre Serra, membre du comité de rédaction de la revue « Progressistes », faisait un rappel historique des différentes formes d’organisation scientifiques du travail : taylorisme, fordisme, toyotisme pour prendre quelques exemples. « Toutes ont en en commun la parcellisation des tâches et la culpabilisation des salariés si l’objectif collectif n’est pas atteint ». Il illustrait ensuite son propos par l’application de ces principes à l’industrie automobile dans les usines Peugeot. « Ce système a été introduit sous le nom de Lean management, avec par exemple la recherche des zéros défauts ou la gestion par flux tendus,  », indiquait-il. Elargissant son propos à d’autres secteurs, aussi bien dans le secteur privé que dans le secteur public, la pratique de l’évaluation permanente et le culte des indicateurs soi-disant objectifs pour exalter la performance individuelle constituent quelques-unes des caractéristiques du « new management ».  « Il conduit de plus en plus au burn out, c’est-à-dire à l’épuisement total par le travail ». 

Les échanges riches et nourris s’engageaient sur la distinction entre souffrance physiques et souffrances psychiques. La part de ces dernières augmente car le travail est de moins en moins créateur d’identité et de fierté en raison du processus de dépersonnalisation. De ce fait, le progrès technique  n’est pas forcément synonyme d’amélioration des conditions de travail. Le rétrécissement de la dimension collective du travail avec l’offensive libérale qui considère toute protection sociale (droit du travail et droit syndical) comme « une insupportable rigidité à éradiquer au nom de la compétition » contribue à accentuer résignation et désespérance chez les travailleurs. La recherche de profits et de dividendes toujours plus élevés conduit à utiliser, outre les dumpings sociaux, fiscaux et environnementaux bien connus qui alimentent en partie les délocalisations, une autre forme de dumping, le « dumping managérial ». Celui-ci pourrait aussi se définir comme un chantage à l’emploi qui s’est développé depuis quelques années : accepter des conditions de travail dégradées pour éviter la fermeture et la délocalisation. 

« Le travail doit être source d’émancipation par son intégration à la société. Mais le projet de société dessiné par le capitalisme et la loi du marché en fait souvent un outil d’aliénation », estimait Pierre Serra. Francis Daspe concluait qu’il s’agissait en réalité d’un « double combat à mener, à la fois syndical et politique ».