Réponse de Louis ALIOT, député, conseiller municipal de Perpignan, à Madame la Présidente de l’Union des Jeunes Avocats du Barreau de Perpignan (UJA’66) :

“Madame la Présidente,

 

 

J’ai pris connaissance de votre lettre via le site Ouillade, et je me devais de vous y répondre. Je suis attaché au rôle de l’Avocat dans notre société, non parce que j’exerce ce métier, mais parce que l’Avocat est le rempart protecteur du citoyen, tout en étant son porte-parole.

 

La justice de proximité est l’un des moyens pour protéger nos concitoyens. C’est pour cela qu’en ma qualité de Conseiller Municipal de Perpignan, j’ai soutenu l’installation du Palais de Justice en cœur de ville. S’agissant de la loi présentée par Madame la Garde des Sceaux et soutenue par les parlementaires de la majorité, dont je ne suis pas, il ne vous surprendra pas que je ne partage pas la méthode, ni l’objectif réel. Une grande partie de vos revendications sont en effet liées à la déjudiciarisation de la justice civile (dématérialisation, privatisation par recours à la médiatisation privée, suppression du Tribunal d’Instance), phénomène que je réprouve. L’objectif du Gouvernement n’est pas de réformer la justice civile pour la rendre plus efficace et plus proche du citoyen, mais de faire plus, avec moins de moyens. L’Etat français engoncé par les règles budgétaires européennes, tente de limiter ses dépenses par tous les moyens.

 

 

L’Etat, pour ne pas avoir à augmenter le nombre de magistrats et de greffiers et pour ne pas doter l’administration des moyens indispensables, va déjudiciariser ou va confier des missions à des entreprises privées. La fin du Tribunal d’Instance n’est motivée que par le rapatriement de ses moyens humains et budgétaires auprès du Tribunal de Grande Instance. Il s’agit purement et simplement d’une mutualisation. Une mesure par conséquent bien éloigné de la réalité d’une justice de proximité. La dématérialisation est un but en soi louable, car elle permet à l’administration de faire des progrès et d’améliorer l’efficacité de son action. Le RPVA a montré son efficacité. Mais cet objectif ne peut se faire sans tenir compte de la fracture numérique et sans accompagnement. En outre, la dématérialisation ne doit pas conduire à la fin des audiences et donc à la fin de l’accès physique à l’institution judiciaire par le citoyen.

 

 

J’ai pris note que l’une de vos remarques, concerne la baisse des exigences procédurales. Je pense que vous faite référence aux réformes en matière de procédure pénale. Comme le disait Rudolf Von Jhering : « Ennemie jurée de l’arbitraire, la forme est la sœur jumelle de la liberté ». Il n’en demeure pas moins vrai qu’à trop de formalisme, on entrave l’action des forces de sécurité. L’intérêt est de trouver un juste milieu entre l’efficacité indispensable de nos forces de l’ordre, et l’efficacité de nos protections contre l’arbitraire. La sécurité de nos concitoyens passe par cet équilibre entre ses deux impératifs.

 

 

Pour finir, je pense que l’Institution Judiciaire est maltraitée depuis trop d’années. Je me dois de rappeler les moyens donnés à la justice. La France dépense 72 euros par habitant, quand l’Allemagne en dépense 146 et le Royaume Uni 155 ! Voilà la réalité. Sans un vrai budget de cette mission régalienne de l’Etat, rien ne sera jamais possible.

 

Restant à votre disposition pour une rencontre, et débattre des besoins spécifiques des jeunes Avocats du Barreau de Perpignan.

 

 

Je vous prie d’agréer, Madame la Présidente, en l’assurance de mes sentiments les meilleurs”.

 

 

Louis ALIOT
Député
Conseiller municipal de Perpignan