“La coopération Franco-Sénégalaise en danger ?”

 

 

Paul Miffre, vice-président du Comité de Développement de la Coopération décentralisée des Pyrénées-Orientales, coordinateur des projets franco-sénégalais, communique :

-“Il me semble important de revenir sur la genèse des projets de coopération décentralisée au niveau de notre département.
Le Comité de Développement de la Coopération Décentralisée, actuellement présidé par Michel Barthes (Maurice Piferrer en étant le fondateur) a été créé en 2002.
La vocation de cette structure associative, est de fédérer des collectivités sur la coopération et de les accompagner dans le montage de leurs projets en direction de partenaires du Sud. En outre, elle a comme objectif l’éducation à la citoyenneté et à la Solidarité Internationale.
A l’heure actuelle, le contexte sécuritaire dans certains pays a induit un ralentissement de projets menés au Cameroun, au Niger, au Burkina Fasso ou encore au Mali.
D’autres persévèrent comme ceux mis en œuvre au Sénégal et au Kenya. Mais globalement, à l’heure actuelle, et plus que jamais, il convient d’être très prudent dans la conduite des actions de Solidarité Internationale.

 

 

Les évènements récents survenus au Sénégal, mettent-ils la coopération décentralisée en danger ?

 

 

Il est très difficile de se prononcer sur l’issue des conflits actuels chez nos partenaires. Cette situation si elle perdure, peut provoquer des perturbations sur la continuité même des projets engagés.
La jeunesse est au cœur de la problématique actuelle et il devient difficile de mobiliser ce public sensible sur des enjeux de gouvernance ou des actions qui semblent moins les concerner.
Les axes de développement sur lesquels nous intervenons concernent pourtant un ensemble de problèmes majeurs spécifiques au pays.
Nous accompagnons les collectivités locales sur la mise en œuvre d’une gouvernance locale efficiente en fédérant des communes sur la création d’intercommunalités. C’est le cas des communes du Soler et de Rufisque qui commencent à gérer activement la collecte des déchets et leur valorisation. Ces projets sont soutenus et par le ministère de l’Europe et des Affaires étrangères de la République Française et par le ministère sénégalais de la Gouvernance territoriale, du Développement et de l’Aménagement du territoire. Ce projet devrait amener le démarrage de la construction, à l’horizon 2023, d’une usine de traitement et de recyclage des déchets collectés sur le modèle de celle de Calce que les élus sénégalais avaient visitée.

La potabilité de l’eau et la préservation des ressources naturelles sont également un enjeu sur lequel nous travaillons en apportant des expertises et des matériels performants spécifiques au traitement de l’eau et fabriqués ici dans le département.
Nous développons également des actions concernant la lutte contre la dette alimentaire et la transition écologique. La pression foncière incite les collectivités locales à urbaniser de façon massive sur des terres agricoles. Nous favorisons et provoquons des partenariats publics privés pour l’implantation de serres agricoles photovoltaïques permettant de répondre efficacement d’une part à la problématique énergétique, d’autre part à la préservation de la ressource alimentaire ainsi qu’au développement d’activités à fort potentiel économique.

Pour revenir aux incidents qui émaillent ce pays, la jeunesse est aujourd’hui en partie désœuvrée, sans emploi et sans perspective à court terme. La propagation d’activités lucratives informelles touche beaucoup de secteurs. Le contexte sanitaire lié au COVID fait également partie des causes multifactorielles qui gangrène et ralentit aujourd’hui le développement normal du Sénégal.
Lors de ma dernière mission en date, au mois de décembre, j’ai été confronté à une réalité bien inquiétante dans ce domaine. Fort de mon passé dans la gendarmerie et eu égard à mes fonctions au sein de la communauté Urbaine Perpignan-Méditerranée Métropole (PMM, j’ai été sollicité sur la sécurité privée et à la problématique liée au manque de formation et de salaire décent, de jeunes embauchés sans aucune préparation ou compétences requises. J’ai pu constater qu’il suffisait d’équiper un jeune sportif d’un tee-shirt sécurité, de lui fournir une carte ad hoc pour qu’il devienne instantanément un agent de sécurité.

Nos partenaires nous ont alors proposé de réfléchir à la conception d’une formation agréée, à une législation appropriée en la matière et à la création d’un organisme de contrôle de l’Etat.

J’ai été également sensibilisé au phénomène de radicalisation et sa montée en puissance à l’intérieur même du pays. L’inquiétude des plus hautes instances serait que le Sénégal, devienne dans les années à venir, un véritable terreau de l’extrémisme international.
Autre thématique sur lesquelles le ministère de la Vie associative a souhaité travailler est celui de la préparation et l’organisation des Jeux Mondiaux de la Jeunesse (JMJ), qui seront organisés à Dakar en 2026, et pour lesquels la Fédération Sénégalaise de Rugby souhaiterait bien s’y comporter. Le Pays catalan, terre des deux rugbys pourrait, assurément, être un partenaire apprécié et privilégié de la Fédération Sénégalaise de Rugby.
A travers le survol rapide des actions menées par notre Comité de Développement’66, il me semble que la coopération décentralisée et la Solidarité Internationale telle que nous les concevons dans notre département au travers du CDCD’66 constitue une bonne réponse aux différentes problématiques touchant l’Afrique en général et le Sénégal en particulier.

Les projets développés dans ce cadre doivent servir de solutions pour freiner un exode rural très important en direction des grandes villes et au-delà des océans…
Les jeunes sont attirés par le large, en direction d’un hypothétique et fantasmagorique Eldorado alors qu’il existe sous leurs pieds, à condition que l’on garantisse leur droit et leur accès à une existence décente.
Partons du principe que ce qui est bon pour nous est bon pour eux et que nous nous ne sommes jamais aussi bien que chez soi.
Volem viure al país, au Sénégal pour la jeunesse, c’est également le cas !…”

 

P.M.

 

Présentation de la coopération décentralisée Rufisque – Le Soler au Président de la République du Sénégal,  Macky Sall.