Claude Cymerman vit aujourd’hui pratiquement à l’année à Argelès-plage.

Carlos de Lazerme, un grand écrivain catalan méconnu…

Pour Claude Cymerman, auteur de l’ouvrage “La prodigieuse verve verte de Carlos de Lazerme” – Qui vient de paraître aux éditions Les Presses Littéraires, à Saint-Estève – “comme il advient très souvent dans le domaine des créations de l’esprit, Carlos de Lazerme (Perpignan 1873 – Elne 1936), est resté bien injustement ignoré du public français et même catalan (…). Il faut sans doute voir les raisons de cette méconnaissance dans son éloignement de notre capitale – faiseuse de réputations – et dans son repli hautain sur ses terres catalanes. D’autre part, son mépris viscéral pour tout ce qui pouvait lui paraître factice et affecté, peut-être aussi une tendance provocatrice dans les thèmes abordés – et tout particulièrement dans l’expression du sexe et du saphisme -, ont pu choquer ou effaroucher certains de ses contemporains moins ouverts et moins “avertis” et tracer autour de lui une sorte de “cordon sanitaire”. Ce qui semble évident, c’est qu’il est encore loin d’avoir gagné la pleine notoriété qu’il mérite et que devraient lui valoir son immense talent et sa prodigieuse verve (verte, mais pas seulement). Il est temps, me semble-t-il, de redonner enfin à Carlos de Lazerme – sans jeu de mots – ses titres de noblesse. Sa création embrasse presque tous les genres littéraires et toutes les nuances : la poésie, à mi-chemin entre une remémoration mélancolique des terres roussillonnaises et une idéalisation nostalgique d’amours à jamais disparues ; le théâtre, dans une approche symboliste des mystères de l’existence humaine, associée au thème de l’incommunication et de l’impossible rencontre entre les êtres ; le conte, parodique et jubilatoire, s’appuyant sur la dérision, l’ironie et quelques scènes épicées ; l’essai, d’une tonalité totalement différente, où l’écrivain-aristocrate se livre à une charge vengeresse et sarcastique contre les compromissions d’une bourgeoisie corrompue et plus particulièrement contre “le courant des idées actuelles qui nous emporte  (…)”.

Claude Cymerman a occupé successivement les fonctions de délégué général de l’Alliance française de Paris en Argentine et d’attaché culturel d’ambassade de France en Espagne. Professeur des universités, il a dirigé les départements d’études ibériques et ibéro-américaines des universités de Paris X-Nanterre et de Rouen Haute Normandie.

Claude Cymerman a siégé au sein du conseil supérieur des universités, du comité directeur des langues néo-latines, du jury du Grand Prix de la traduction Cultura Latina ou encore du conseil d’administration de la Maison de l’Amérique Latine et a présidé le centre d’étude des littératutres et des civilisations du Rio De La Plata. Il est l’auteur d’une douzaine d’ouvrages et de plusieurs dizaines d’articles critiques sur la littérature hispano-américaine.

Revenu récemment dans les Pyrénées-Orientales, plus précisément à Argelès-sur-Mer, dont il est originaire, Claude Cymerman se consacre désormais aux lettres roussillonnaises, et tout particulièrement à l’oeuvre de Carlos de Lazerme.

Quand on lui demande “Pourquoi ce livre ?”, Claude Cymerman répond : “Mon père Polonais d’origine, était représentant en librairie. Pendant quarante années, j’ai enseigné la littérature latino-américaine. Mon père était un grand amateur du peintre Terrus – Ndlr. Il possède d’ailleurs plusieurs tableaux de cet artiste – et je dois avouer que c’est la connaissance de Terrus et de son formidable travail qui m’a entraîné vers Carlos de Lazerme et vice-versa. Les deux grands hommes m’ont attiré. Puis, je suis né à Argelès, c’est donc en quelque sorte un retour aux sources. J’ai décidé de me lancer dans la littérature catalane ! “.

Le dernier ouvrage de Claude Cymerman est écrit dans un style littéraire très complet, parce que méthodique, mais avec beaucoup, beaucoup d’humour.

Au fil des lignes, on a le sentiment que Claude Cymerman et Carlos de Lazerme se sont déjà rencontrés ; dans une autre vie ? Qu’ils se connaîssent bien. Très, très bien. On les imagine prenant un verre à la Closerie des Lilas, discutant le bout de gras place Dauphine, toujours à Paris. S’échangeant des confidences ramassées sous l’oreiller. Se moquant de l’air du temps, en Don(s) Juan(s) libre(s) et léger(s).

Au fil de ces lignes, c’est une complicité étonnante, surprenante, qui se noue entre les deux personnages, entre l’auteur et, en quelque sorte, son interprète. C’est une suite d’empathies entre Cymerman et Lazerme. Entre Claude et Carlos, exception faite de cette haine pour la République qu’à le second et que n’a pas le premier. Cela n’empêche pas Claude Cymerman de prendre la défense de son héros : “Il ne faut pas oublier qu’à la Révolution la famille Lazerme a été dépossédée de tous ses biens… qui sont allés enrichir les bourgeois !”. Mais c’est sur le genre “humour ravageur” que les deux individus sont inséparables.

En ces temps modernes, où paradoxalement la modernité littéraire fait plutôt défaut, Claude Cymerman a l’audace de nous entraîner dans le sillage d’un personnage haut-en-couleur, captivant, extraverti. Il ose ouvrir une brêche, puis la colmater avec une pensée, entre la biographie et le roman fantastique, avec une justesse et un réalisme bluffants.

C’est là “LE” livre que tous les Roussillonnais férus d’histoire locale, curieux de littérature adulte et de subtilités (dé)raisonnables devraient posséder dans leur bibliothèque, voire sur leur table de chevet…

– Claude Cymerman : claucym1@orange.fr

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