Le palmarès des villes qui déploient le plus de moyens face à l’insécurité

Par Paul Carcenac (Rédaction Le Figaro)

Dans les villes gérées par la droite, comme dans celles gérées par la gauche, presque plus aucun édile ne semble en mesure de se passer de la police municipale

EXCLUSIF/ Rédaction Le Figaro.- Police municipale, caméras de vidéoprotection, armes… Quelles sont les municipalités qui combattent le mieux les incivilités et la petite délinquance ?

Historiquement, la question de la police municipale et celle de la vidéoprotection étaient très connotées politiquement. Ce temps-là est révolu. Les enjeux de tranquillité publique sont tels qu’il semble difficile de se passer de ces services. «Aujourd’hui, tout le monde reconnaît leur intérêt même les maires communistes ou socialistes, explique Alain Bauer, professeur de criminologie au conservatoire des Arts et métiers. Il y a encore quelques réticences chez certains à l’extrême gauche et chez les écolos, mais de moins en moins depuis qu’ils gèrent de grandes villes. Rencontrant la réalité, ils font avec», poursuit-il. Reste que les municipalités n’y consacrent pas toutes les mêmes moyens humains et technologiques. Reconnaître, grâce aux chiffres, quelles sont les bonnes élèves et les plus laxistes, c’est l’objet de notre palmarès ci-dessous pour les 30 villes les plus peuplées de France.



Nice en tête du classement, sans surprise

La capitale azuréenne a pris depuis longtemps la mesure du problème posé par l’insécurité. Aujourd’hui, elle a une réelle longueur d’avance sur toutes les autres grandes métropoles françaises en termes d’effectifs policiers comme de vidéosurveillance. Le leadership niçois sur ce sujet est aussi technologique. «Depuis la colline du château nous pouvons visualiser des détails sur la piste de l’aéroport à 5 km, explique Christian Estrosi, le maire. Donc à 300m, on peut suivre un pickpocket de manière très précise». En outre, des boutons d’alerte sont installés dans l’espace public. En cas de vol ou d’agression, ils permettent à n’importe quel passant de prévenir la police municipale et d’orienter les caméras. Les commerçants disposent aussi du même outil. Les habitants semblent satisfaits, selon l’édile. «Il ne se passe pas un jour sans que nous ayons des lettres de remerciements, de félicitations, pour la police municipale», assure-t-il. Quant aux caméras, 79% des Niçois se déclarent favorables au dispositif, selon une étude commandée par la municipalité.

On retrouve ensuite d’autres villes du sud de la France, comme Nîmes ou Perpignan, confrontées depuis longtemps aux enjeux de la délinquance.

Police municipale : Paris s’y met

La capitale française obtient la 20e place de notre palmarès. Sur la vidéosurveillance, la ville est bien dotée. En terme humain, il y avait des ASVP (agents sécurité de la voie publique). Mais la police nationale était historiquement seule aux manettes, grâce à des pouvoirs étendus. Depuis le 18 octobre dernier, les habitants peuvent aussi voir patrouiller des policiers municipaux. Anne Hidalgo s’y est enfin employée. Ces derniers sont censés lutter contre les incivilités, tranquilliser les quartiers et… faire respecter les règles antipollution. Ils devraient être 5000 agents à la fin du mandat de la maire de Paris.

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Les villes de l’Ouest ferment la marche

Brest est la dernière des grandes villes de France à ne pas disposer de police municipale. Le maire socialiste François Cuillandre s’y est toujours opposé, malgré la récente annonce d’une «brigade de tranquillité urbaine», une promesse de campagne. Face à une vague d’insécurité, cet automne, la préfecture a pris certaines mesures, comme l’installation de caméras de vidéoprotection. «La délinquance en centre-ville prend des proportions intolérables pour les commerçants, les habitants, les passants…», expliquait Jean-Philippe Setbon, le sous-préfet, au micro de la chaîne locale Tébéo, «notamment à cause d’agressions physiques, verbales et du harcèlement de rue permanent. […] La situation à Brest n’est plus celle qu’on a connue il y a quelques années», poursuivait-il.

Dans le bas du classement, on retrouve des villes de l’ouest de la France, historiquement dirigées par la gauche (Rennes, Nantes, Le Mans…). «C’était des villes ou la tension criminelle et délinquante était faible, analyse Alain Bauer. Mais la situation s’est désormais bien dégradée.»


Méthodologie. Nous avons fait deux classements intermédiaires : le premier sur le ratio par habitant des effectifs de la police municipale / ASVP. Le second sur le ratio des caméras. Pour bâtir le classement général, nous avons calculé la place moyenne obtenue par chaque ville au regard de ces deux tableaux. Nous avons attribué un bonus si la police est équipée d’armes létales, et un autre, moins important, en cas d’armement avec des pistolets à impulsion électrique (1 place et 0,5, respectivement, sur le rang moyen). Pour départager des villes ex aequo, nous avons privilégié celles qui affichent le plus grand ratio de policiers/ASVP par habitant.

Sources. Les chiffres 2020 du nombre de policier municipaux et d’ASVP (agents de sécurité de la voie publique) sont ceux publiés par le ministère de l’Intérieur. Nous avons obtenu le nombre de caméras de vidéoprotection (exclusivement celles sur la voie publique, et pas dans les transports) directement auprès des mairies, sauf pour Lille, qui n’a pas souhaité répondre. Nous avons donc pris des estimations publiées par la presse locale. Les informations sur l’armement de la police proviennent aussi de cette même source.

Police municipale et ASVP : Par souci de clarté, nous avons choisi de grouper les effectifs, mais les policiers municipaux et les ASVP (agents de surveillance de la voie publique) ont des missions bien différentes. Les ASVP sont chargés de verbaliser des infractions au stationnement, au Code de la route ou à la propreté. Les policiers municipaux, eux, ont des attributions plus larges sur la sécurité publique.

 

(Photos @Ville de Perpignan – Police Municipale)

 

Sécurité du quotidien : le palmarès des villes qui mettent le plus de moyens

Commune Policiers municipaux et/ou ASVP pour 10.000 habitants Armement des policiers municipaux Caméras pour 10000 habitants
1 Nice 19,65 Arme létale 71,79
2 Nîmes 14,34 Arme létale 29,88
3 Perpignan 13,57 Arme létale 27,80
4 Aix-en-Provence 11,23 Arme létale 32,00
5 Saint-Étienne 13,68 Arme létale 22,83
6 Tours 7,88 Arme létale 23,64
7 Montpellier 8,14 Arme létale 11,89
8 Reims 7,67 Arme létale 12,39
9 Amiens 11,34 Non armés 10,22
10 Toulon 6,92 Arme létale 14,48
11 Annecy 6,78 Arme létale 18,20
12 Le Havre 6,46 Arme létale 21,45
13 Lyon 7,44 Arme létale 11,06
14 Limoges 6,66 Arme létale 13,69
15 Clermont-Ferrand 4,73 Impulsion électrique 7,30
16 Marseille 4,90 Arme létale 18,56
17 Toulouse 7,61 Arme létale 9,88
18 Grenoble 8,20 Impulsion électrique 7,45
19 Bordeaux 7,27 Impulsion électrique 6,05
20 Paris 4,87 Non armés 18,43
21 Boulogne-Billancourt 6,50 Arme létale 11,66
22 Strasbourg 6,94 Arme létale 9,50
23 Angers 5,49 Impulsion électrique 9,81
24 Dijon 3,95 Arme létale 10,01
25 Brest 1,43 Pas de police municipale 11,78
26 Lille 6,57 Non armés 2,15
27 Nantes 4,85 Impulsion électrique 4,46
28 Villeurbanne 3,72 Arme létale 9,14
29 Le Mans 3,99 Impulsion électrique 5,32
30 Rennes 4,34 Impulsion électrique 2,81