La disparition de Christian Bourquin : la fin d’une ère ?

J’étais présent aux obsèques de Christian Bourquin et j’ai écouté avec recueillement les éloges funèbres ; celles du Premier ministre furent sobres et précises.

La disparition d’un homme que l’on a longtemps côtoyé est toujours une interrogation sur la fragilité de nos vies : Christian Bourquin a vécu au quotidien cette fragilité et su faire face à un mal inexorable avec une volonté et un courage exemplaires. Respect !

Je veux surtout garder le souvenir d’un homme amoureux de son pays catalan, de son Canigou, de son rugby, de ses villages et ses terroirs.

Je pense évidemment aussi à nos affrontements qui n’étaient pas des postures mais l’expression de vraies différences et de vraies divergences.

Formé par Georges Frêche, chez lui l’exercice de l’autorité était brutal et sans partage : c’était un guerrier redoutable qui d’ailleurs a gagné presque tous ses combats, législatives, cantonales, régionales, sénatoriales ; chef de tribu, certains diront chef de clan, il laisse de nombreux orphelins et orphelines…

Une page ou plutôt une ère de l’Histoire politique de notre département trouve aujourd’hui son épilogue : demain sera très différent et il faut espérer qu’accédera aux responsabilités publiques une autre génération moins dogmatique, plus ouverte à la contestation et au partage des pouvoirs, une génération de femmes et d’hommes plus exigeants sur la démocratie interne aux partis politiques, plus respectueux de leurs adversaires.

Christian Bourquin disparaît à la veille d’un grand bouleversement de l’organisation territoriale de notre pays qu’il combattait avec la violence qu’on lui connaît ; le Premier ministre l’a rappelé. Encore un sujet qui nous séparait : j’ai toujours milité pour une simplification forte du “mille feuilles ” français à partir de Régions, de Métropoles, et d’intercommunalités puissantes ; décidément une ère nouvelle est en marche !

Christian Bourquin c’était aussi , beaucoup l’ont rappelé , “l’accent catalan de la République française” mais pour moi ce slogan réduisait la catalanité à son folklore alors qu’il faut plus que jamais la comprendre comme un héritage permettant d’exploiter avec efficacité notre nouvelle proximité avec la Ville-monde, Barcelone ; il préférait l’option de Georges Frêche pour qui l’avenir de Perpignan ne pouvait se concevoir que dans l’ombre de Montpellier. Là encore une ère nouvelle est à naître.

J’ai souffert de ne pouvoir construire un partenariat global et pluriannuel entre le Conseil Général, la ville de Perpignan et son agglomération même si nous avons pu mener de concert plusieurs grand projets comme la Plateforme multimodale et le chantier combiné de Saint Charles ou encore le combat, encore devant nous, de la ligne à grande vitesse Perpignan- Montpellier.

Quelles que soient nos différences et nos divergences nous avons toujours su nous retrouver sur la défense de la laïcité et des valeurs républicaines face au FN et à ses dérives racistes, xénophobes et populistes. Ce combat là nous unissait.

Le bilan de l’homme public se fera plus tard ,comme toujours, mais aujourd’hui je veux surtout penser à l’homme, à ses proches et à ses fidèles qui portent un deuil douloureux ; je veux garder comme ultime souvenir notre dernier échange dans le premier TGV direct Barcelone–Perpignan, un échange affectueux et de fierté catalane partagée”.

Jean-Paul Alduy.