Fédérer le peuple pour et par l’Ecole de la 6° République

“L’Ecole n’est pas une question neutre. Elle est fondamentalement politique et idéologique. Elle ne se gère pas en « bon père de famille ». Le Parti de Gauche place ainsi, depuis sa fondation, l’Ecole au premier rang de ses préoccupations.
Notre projet de société détermine notre projet pour l’Ecole, et non l’inverse. Il veut faire de l’Ecole de la République une Ecole vraiment nationale, à rebours de l’Ecole à la carte des libéraux qui conduit à la territorialisation, à la balkanisation et au triomphe de « l’adéquationnisme ». Il considère que l’Ecole a pour mission de proposer à la France le peuple républicain dont elle a besoin pour faire vivre le grand idéal qui définit son identité fondée sur le pacte civique inscrit sur tous nos établissements publics : « Liberté, Égalité, Fraternité ».
La 6e République à laquelle nous aspirons nécessite une Ecole nouvelle, participant de l’émancipation individuelle et collective. Pour faire advenir une République démocratique, il nous faut faire émerger le sujet autonome et l’esprit critique du citoyen de demain. Pour garantir la République laïque, il nous faut une Ecole préservée de tous les prosélytismes. Pour soutenir la République sociale, nous avons besoin d’une Ecole qui combatte les inégalités, et non les perpétue ou les aggrave. Pour répondre au défi climatique et engager la transition écosocialiste de notre économie, il nous faut élever le niveau de qualification de tous les élèves”.

Instruire, Qualifier, Emanciper
Le Parti de Gauche décline sa vision de l’Ecole autour du triptyque « Instruire, Qualifier, Emanciper ».
Instruire repose sur une conception sans ambiguïté du savoir et de sa transmission. Seule richesse qui augmente pour chacun quand on la partage entre tous, le savoir élève à l’universel et repousse les frontières de l’ignorance. En grandissant l’individu, il grandit la société dans laquelle il vit. C’est la République du savoir.
Qualifier renvoie à l’insertion sociale de chacun qui constitue une des finalités du système éducatif. La qualification est la garantie d’une maîtrise professionnelle durable parce que susceptible de s’enrichir et d’évoluer. Le diplôme est la pierre angulaire de sa reconnaissance. Reconnu dans les conventions collectives, il est source de droits sociaux pour tous ceux qui doivent travailler pour vivre. A l’heure de l’inversion de la hiérarchie des normes, la qualification est l’un des fondements de la République sociale que nous voulons bâtir.
Emanciper donne sens à la formule de Condorcet. Il assignait à l’école de « former des citoyens qui ne s’en laissent pas conter mais qui entendent qu’on leur rende des comptes ». L’Ecole doit affranchir l’individu de toute influence, développer son esprit critique et créatif. La révolution citoyenne à l’Ecole doit ainsi concourir à donner à chaque personne la possibilité de son autonomie, la maîtrise pleine et entière de son devenir et sa capacité à prendre part, en toute liberté, au débat démocratique. En ce sens, l’Ecole est l’un des lieux de la formation de la souveraineté populaire.
Nous fixons ainsi à notre projet éducatif une finalité claire. Former, dans un même élan, l’Homme et la Femme, le travailleur et la travailleuse, le citoyen et la citoyenne. Se préoccuper de l’Homme sans prendre en considération le travailleur et le citoyen est une entreprise vaine et dérisoire. Viser le travailleur en négligeant l’Homme et le citoyen équivaut à un utilitarisme réducteur. Se focaliser sur le citoyen en se détournant de l’Homme et du travailleur consisterait en un formalisme abstrait ou masquerait des arrière-pensées suspectes”.

Résister et proposer
L’Ecole est un enjeu de la lutte des classes. Le combat pour une Ecole de l’égalité et de l’émancipation prend une signification et une résonance particulières dans l’enseignement professionnel et la voie technologique. Ils font l’objet d’un mépris de la classe dominante, entre indifférence et ton compassionnel. Cet enseignement est aujourd’hui sous le coup des attaques du ministre Blanquer dans le cadre de la contre-réforme du baccalauréat et du lycée qu’il prépare.
Plus largement, l’autonomie des établissements et une noria de contre-réformes (rythmes scolaires, collège, lycée etc.) participent de l’instauration d’une Ecole à géométrie variable. Ces évolutions favorisent à la fois la dérive d’une gestion managériale source d’un sentiment de dépossession chez les professeurs et d’une Ecole à multiples vitesses, source d’inégalités croissantes pour les élèves et les familles.
Le gouvernement d’Emmanuel Macron est celui de l’oligarchie. Sa politique éducative s’inscrit dans la continuité pratique et une cohérence idéologique avec celles des différents gouvernements PS et LR/UMP qui l’ont précédé. Elle vise à la marchandisation de l’Ecole, à sa réduction à des fins utilitaristes, à une vision minimaliste des savoirs, à sa soumission au MEDEF et à l’Union européenne, au développement de l’enseignement privé, à la mise en œuvre de l’austérité alors même que les besoins éducatifs sont croissants.

Face aux projets du gouvernement nous devons d’abord résister. Les militants du Parti de Gauche doivent ainsi contribuer au développement, au sein de la France insoumise, d’un vaste réseau militant de parents d’élèves, de professeurs, de personnels, de lycéens et plus largement de citoyens et citoyennes attachés au maintien et au devenir du service public d’éducation.
Il nous faut aussi mener un travail de proposition, sur la base du programme éducatif établi durant la campagne présidentielle, et crédibiliser la mise en œuvre de nos propositions. Nous ne pouvons en rester à la sauvegarde du statu quo. Le Parti de Gauche entend ainsi travailler à la formulation de mesures concrètes, aptes à être appliquées une fois en situation de gouvernement, alimentant notre projet de société.
Il aura ainsi à s’engager dans le débat public sur l’Ecole pour s’efforcer d’en reformuler les termes. Au delà des oppositions routinières, devenues pour certains de véritables fonds de commerce, entre prétendus « républicains » et pseudos « pédagogues », il veut participer de la constitution d’un camp, celui des partisans de l’Egalité et de la Liberté, face aux promoteurs du marché et de l’autoritarisme managérial”.

Contribuer à fédérer le peuple
Les questions éducatives peuvent être un puissant levier pour fédérer le peuple sur des causes d’intérêt général. L’Ecole, publique, gratuite, laïque est un capital commun au peuple. Elle doit être confortée contre tous les vents mauvais des « déclinistes » ou de « l’école bashing ». Les personnels doivent être soutenus avec énergie dans l’exercice de leur mission d’intérêt général.
L’Ecole de la République est d’abord le lieu du peuple en préparation. Elle est porteuse d’attentes sociales fortes. Elle est une ambition collective. Les mobilisations en faveur de l’éducation nous invitent à emprunter le chemin menant de la résistance à la révolution citoyenne pour faire de l’Ecole de la 6° République une « fabrique de l’intérêt général ». Dans cette grande Å“uvre, le Parti de Gauche a un rôle décisif à tenir et à assumer”.

Francis DASPE, président de la Commission nationale éducation du PG’66 – co-auteur du livre “Manifeste pour l’école de la VIème République” (Editions du Croquant, août 2012).